Comment s'étonner que des populations démunies votent « oui » massivement, lorsqu'on leur promet que ce choix leur apportera un revenu minimum garanti et une couverture sociale identiques à ceux dont bénéficient les Français ? Pourquoi le peuple français n'a t-il pas été consulté, au sujet de départementalisation de Mayotte ? N'eut-il pas été normal de lui demander son avis ? Lors des accords sur le nouveau statut de la Nouvelle Calédonie, le gouvernement de Michel Rocard avec organisé un référendum national. La majorité des Français qui y avaient participé s'était prononcée pour le « oui », même si l'on peut légitimement se poser la question de savoir si les habitants de Roubaix ou du plateau de Millevaches étaient réellement conscients de l'enjeu de ce référendum, en 1988. Pourquoi une procédure similaire n'a-t-elle pas été suivie pour Mayotte ? La départementalisation de ce territoire insulaire n'a fait l'objet d'aucun débat, en France. Pire, elle est passée complètement inaperçue, les grands médias ne l'ayant que très peu évoquée !Il était du devoir du gouvernement français d'informer les Français. Il aurait dû leur dire la vérité, au sujet de Mayotte. Leur avouer que 60% de leurs nouveaux « compatriotes » ne parlent pas français et que la polygamie est une pratique courante et acceptée, à Mayotte. Qu'en l'an 2000, 35 % des hommes et 40% des femmes étaient analphabètes (je doute que ces chiffres aient beaucoup évolué, depuis). Que la charia a plus de valeur, aux yeux des Mahorais, que les lois de la République. Que jusqu'à la récente départementalisation, seuls les cadis (juges islamiques) rendaient la justice, en matière de statut personnel. Que la superficie de cette île est de 376 km², contre 4000 en moyenne pour un département « normal ».
Enfin, le gouvernement français n'aurait-il pas dû prendre conscience que cette départementalisation constituait en fait une véritable bombe à retardement ? Mayotte n'est située qu'à 30 kilomètres d'Anjouan, la plus proche des trois îles de l'archipel faisant partie de l'Union des Comores. Mayotte représente donc un véritable aimant pour les Comoriens des autres îles. Ces derniers, citoyens d'un des pays les plus déshérités de la planète, voient dans cette île restée française un véritable havre de bien-être. Une terre où l'on peut trouver du travail (au noir) et éventuellement bénéficier de la couverture sociale et de l'accès aux soins, d'une éducation de qualité, et où la citoyenneté française peut permettre de gagner la France et l'Union Européenne qui y sont vus comme de véritables eldorados. Sait-on qu'avec au moins 60 000 Comoriens, Marseille est aujourd'hui la plus grande ville comorienne, loin devant Moroni, la capitale ?

HERVE CHEUZEVILLE
14 octobre 2011
(Auteur de trois livres: « Kadogo, Enfants des guerres d'Afrique centrale », l'Harmattan, 2003; « Chroniques africaines de guerres et d'espérance », Editions Persée, 2006; « Chroniques d'un ailleurs pas si lointain – Réflexions d'un humanitaire engagé », Editions Persée, 2010)
Partage